lundi

au début j'étais partie pour aller voir There will be blood à 17h10 mais une fois arrivée à l'UGC Ciné Cité de la Défense l'écran affichait la séance complète. J'ai appelé Emile pour lui demander les séances sur les Champs, l'imbécile jouait à son jeu entre chaque chargement de pages. Toutes les séances étaient à des horaires trop justes alors je suis rentrée chez moi par le train, faisant passer avec moi une nana et sa fille que je voyais galérer et gronder leur ticket de métro.
Une fois chez moi j'ai bien pensé à réserver ma séance pour 20h30, j'ai bu un café trop bon comme rarement j'en bois chez moi, puis j'ai scanné des pages de Technikart à des mecs qui ont la flemme de l'acheter ou qui peuvent pas.
Vers 19h45 je descends, embarquant ma soeur avec moi, Emile est dans le hall avec ses copains, ils ont joué une bonne partie de l'après-midi, agitant leurs bras, criant pour exprimer leur amusement. On appelle ma mère pour lui dire qu'on se casse, elle nous dit qu'elle arrive bientôt et qu'elle peut nous accompagner, ça nous évitera de prendre le train. On grimpe dans la voiture avec Emile, on lui a proposé de venir avec nous mais que bon le film était très long et qu'il arriverait peut-être pas à comprendre, ma soeur lui a sorti "c'est un film sur le pétrole", un peu avant elle me disait "il sait même pas ce que c'est le pétrole". Moi je pensais "mais qui sait ce que c'est le pétrole?", on peut dire que c'est un peu un liquide qui ressemble à du Nutella et qui fait tourner le monde.
Il est quand même venu dans la voiture, ça lui fait toujours une ballade dans Courbevoie, ma mère nous dit "c'est comme si on c'était donné rendez-vous" alors qu'elle ignore qu'on l'a bien attendu 10 minutes avant qu'elle se ramène.
Au cinéma on retire nos places, la réservation de ma soeur n'a pas marché alors elle fait la manip qu'on fait d'habitude et qui prend 5 secondes à tout casser dans une borne d'achat. On parle un peu, on a environ 20 minutes à tuer mais ça passe vite, ensuite il y a les bandes-annonces puis on se dit qu'il y a personne dans la salle, ensuite je vais aux toilettes, je reviens et la salle est pleine comme une bouteille d'eau pas encore ouverte, genre à ras-bord.
Je dérange tout le monde pour retourner à ma place, un peu gênée et tout, et puis du coin de l'oeil je remarque une écharpe rouge qui me fait penser à un mec de ma classe qui en laisse toujours une rouge tomber autour de son cou. Je me rassois, je tourne un peu la tête et je vois que c'est lui, assis à côté de son frère que ma soeur connaît, mais je le salue pas parce que je sais qu'il aime pas ça, qu'il aime pas être dérangé. Le plus fou c'est que juste avant d'aller aux toilettes on parlait du Facebook de son frère, ça ça s'invente pas.
Le mec, je le fais se lever, il se dérange pour moi, je lui frôle les jambes, il a dû croire que je l'évitais, on va devoir s'expliquer ou alors faire style rien ne s'est passé, genre "There will be blood? azi je l'ai raté"

Le film était très long, très bien et assez déprimant, je le mets dans la même boîte mentale que "L'assassinat de Jesse James" et "No country for old men", même ambiance un peu contemplative avec des cow-boys et des grands espaces, Kerouac style.
Pendant une bonne partie du film j'avais l'article de Technikart dans la tête puis parfois des idées et des soucis qui m'empêchaient de me concentrer, alors j'ai fermé les yeux quelques secondes, je me suis ressaisis. Je restais tellement immobile que je me surprenais à oublier mon corps et à ne sentir plus que mes deux yeux cligner et mes lunettes sur mon nez, le reste était comme paralysé, c'était une sensation agréable.
2h38 plus tard je retrouve peu à peu la parole et l'usage de mes jambes. On a juste le temps de prendre le dernier bus en repensant au film chacune de notre côté. En rentrant vers minuit j'avais faim, j'ai préparé une casserole de soupe aux oignons et j'ai essayé d'inviter quelqu'un qui soit encore éveillé pour pas tout manger.Myriam voulait pas manger, Emile lisait son manga à la lueur de sa lampe de chevet, il a bougé son boule jusque dans la cuisine et a continué à lire pendant que je sortais deux grands bols identiques et une louche en plastique blanc.
C'était la première fois qu'on goûtait ce sachet Maggie, avant c'était toujours Poule aux vermicelles. Emile a dit que la soupe était dorée et ça la rendait à mes yeux encore plus délicieuse, la lumière au dessus de nous était aussi un peu dorée, tout baignait dans une lueur un peu mordorée, c'était chouette.

2 commentaires:

Juliette a dit…

"On allait souvent au cinéma. L'écran s'éclairait et on frémissait. Mais encore plus souvent aussi Madeleine et moi on était déçus. Les images dataient et sautaient et Marylin Monroe avait terriblement vieilli. On était triste. Ce n'est pas le film dont nous avions rêvé. Ce n'était pas ce film total que chacun parmi nous portait en soi, ce film qu'on aurait voulu faire ou, plus secrètement sans doute, que nous aurions voulu vivre."

Masculin Féminin
Godard

Murielle Joudet a dit…

c'est un passage que j'ai vu et revu, parfois même en fermant les yeux pour mieux réaliser ce qui était en train de se dire, mais rien à faire, ça me donne toujours un choc,
cimer.