vendredi

Ouais Bon 2005 - 2008 R.I.P

18/04/08

j'ai décidé que désormais les choses allaient se passer ici
Ouais Bon m'obligeait à écrire de petites notes respectant un peu trop de contraintes tacitement fixées par moi-même et qui ne voulaient rien dire. Une note par page, un titre, une bonne longueur, une histoire par semaine voire moins. J'ai dépouillé mon écriture de son corset, à présent c'est plus long, presque quotidien et vraiment pensé comme des tranches, c'est enfin l'écriture comme je l'aime et la pratique.
je n'aime pas le changement, j'aime que certaines choses restent comme elles sont dans une vie où tout décide de changer de place ou de forme sans prévenir, j'aimais l'idée de porter Ouais Bon jusqu'à mes 60 ans comme on décide de faire d'un bracelet son porte-bonheur à vie (...avant de le perdre dans une piscine) mais en y réfléchissant le support et le concept qui annoncent mon écriture ne sont rien à côté de cette dernière.


Murielle.

mardi

La brioche et l'oreiller

le temps de quelques jours j'ai été malade, un mal de gorge sérieux qui s'est peu à peu répandu jusqu'aux oreilles, ça faisait mal, c'était chiant, et je tenais pas à aller chez le médecin, je me soignais d'Advil, de lait chaud et d'un mélange de citron pressé et de miel chauffé pas si dégueu que ça, Doctissimo se révélant être l'alternative à une séance chez le généraliste. Je ne supportais plus les chocolats chauds, tout m'écoeurait et je mangeais ce que je trouvais et ce que je voulais, je ne tenais pas à prendre soin de ma ligne, je ne pouvais pas traiter deux problèmes en même temps et il se trouvait que ma maladie s'accompagnait d'une dépression assez tenace.
tout ça a duré le temps d'une semaine, ce fût comme d'habitude très long et très pénible, je n'avais pas la force de tenir un livre, de suivre un film, d'écouter un album. je voulais juste sortir dans les grands magasins avec ma mère, faire comme si tout allait bien et qu'on allait acheter des trucs qui nous auraient fait plaisir, accrocher mon moral aux gadgets et aux passants mais ces premiers m'énervaient et ces derniers marchent trop lentement.
Je cherchais du réconfort dans la brioche du matin ou dans l'oreiller du soir, dans des objets aussi inertes que moi, des repas moins insipides que mon quotidien. Entre la brioche et l'oreiller rien n'allait et rien ne se passait, je rentrais chez moi, saisissant le courrier au vol, jettant ce qui me paraissait jetable, les prospectus m'irritant de plus en plus, je fonçais dans mon lit, priant pour perdre conscience le plus vite et le plus longtemps possible, éviter cette tranche horaire où tout le monde est à la maison, où des comptes rendus de journée de travail s'échangent dans la cuisine et où des comptes-rendus de journée tout courts s'enchaînent dans les JT. Quand on a le plus besoin d'être seul, au calme, plus ou moins au chaud.

Mon envie de lire des romans n'a alors jamais été aussi forte, aussi je n'ai peut-être jamais autant lu et ces quelques détails peuvent naïvement se traduire par un besoin de fuir la réalité sinon d'y vivre le moins longtemps possible.
Sommeil et lecture, dans l'immédiat je n'aspirais qu'à ça et en dehors de la joliesse de l'idée rien d'autre ne pouvait me faire plaisir.
J'ai pensé qu'être malade n'était plus aussi agréable qu'avant. Avant c'était synonyme de dessins animés, de dorlotage et de jours d'école ratés. Maintenant il faut souffrir en silence et toute seule et aller en cours, et puis ma mère ne me fait plus de thé, ma soeur tente de me convaincre que je ne suis pas malade et Emile se plaint d'avoir attrapé ma maladie.
Avant j'avais l'impression de redécouvrir l'appartement sous une lumière différente, je voyais le ciel très clair et sentais la couverture fraîche sur mes pieds, ma mère prenait de mes nouvelles par téléphone toutes les heures avec une douceur particulière dans la voix, je m'ennuyais chez moi pendant que les autres s'ennuyaient en cours, c'était comme la pluie dehors quand on est bien au chaud et ce genre de trucs qu'on aime bien, tout s'éclaircissait, je me sentais en vie à défaut d'être en cours.

lundi

au début j'étais partie pour aller voir There will be blood à 17h10 mais une fois arrivée à l'UGC Ciné Cité de la Défense l'écran affichait la séance complète. J'ai appelé Emile pour lui demander les séances sur les Champs, l'imbécile jouait à son jeu entre chaque chargement de pages. Toutes les séances étaient à des horaires trop justes alors je suis rentrée chez moi par le train, faisant passer avec moi une nana et sa fille que je voyais galérer et gronder leur ticket de métro.
Une fois chez moi j'ai bien pensé à réserver ma séance pour 20h30, j'ai bu un café trop bon comme rarement j'en bois chez moi, puis j'ai scanné des pages de Technikart à des mecs qui ont la flemme de l'acheter ou qui peuvent pas.
Vers 19h45 je descends, embarquant ma soeur avec moi, Emile est dans le hall avec ses copains, ils ont joué une bonne partie de l'après-midi, agitant leurs bras, criant pour exprimer leur amusement. On appelle ma mère pour lui dire qu'on se casse, elle nous dit qu'elle arrive bientôt et qu'elle peut nous accompagner, ça nous évitera de prendre le train. On grimpe dans la voiture avec Emile, on lui a proposé de venir avec nous mais que bon le film était très long et qu'il arriverait peut-être pas à comprendre, ma soeur lui a sorti "c'est un film sur le pétrole", un peu avant elle me disait "il sait même pas ce que c'est le pétrole". Moi je pensais "mais qui sait ce que c'est le pétrole?", on peut dire que c'est un peu un liquide qui ressemble à du Nutella et qui fait tourner le monde.
Il est quand même venu dans la voiture, ça lui fait toujours une ballade dans Courbevoie, ma mère nous dit "c'est comme si on c'était donné rendez-vous" alors qu'elle ignore qu'on l'a bien attendu 10 minutes avant qu'elle se ramène.
Au cinéma on retire nos places, la réservation de ma soeur n'a pas marché alors elle fait la manip qu'on fait d'habitude et qui prend 5 secondes à tout casser dans une borne d'achat. On parle un peu, on a environ 20 minutes à tuer mais ça passe vite, ensuite il y a les bandes-annonces puis on se dit qu'il y a personne dans la salle, ensuite je vais aux toilettes, je reviens et la salle est pleine comme une bouteille d'eau pas encore ouverte, genre à ras-bord.
Je dérange tout le monde pour retourner à ma place, un peu gênée et tout, et puis du coin de l'oeil je remarque une écharpe rouge qui me fait penser à un mec de ma classe qui en laisse toujours une rouge tomber autour de son cou. Je me rassois, je tourne un peu la tête et je vois que c'est lui, assis à côté de son frère que ma soeur connaît, mais je le salue pas parce que je sais qu'il aime pas ça, qu'il aime pas être dérangé. Le plus fou c'est que juste avant d'aller aux toilettes on parlait du Facebook de son frère, ça ça s'invente pas.
Le mec, je le fais se lever, il se dérange pour moi, je lui frôle les jambes, il a dû croire que je l'évitais, on va devoir s'expliquer ou alors faire style rien ne s'est passé, genre "There will be blood? azi je l'ai raté"

Le film était très long, très bien et assez déprimant, je le mets dans la même boîte mentale que "L'assassinat de Jesse James" et "No country for old men", même ambiance un peu contemplative avec des cow-boys et des grands espaces, Kerouac style.
Pendant une bonne partie du film j'avais l'article de Technikart dans la tête puis parfois des idées et des soucis qui m'empêchaient de me concentrer, alors j'ai fermé les yeux quelques secondes, je me suis ressaisis. Je restais tellement immobile que je me surprenais à oublier mon corps et à ne sentir plus que mes deux yeux cligner et mes lunettes sur mon nez, le reste était comme paralysé, c'était une sensation agréable.
2h38 plus tard je retrouve peu à peu la parole et l'usage de mes jambes. On a juste le temps de prendre le dernier bus en repensant au film chacune de notre côté. En rentrant vers minuit j'avais faim, j'ai préparé une casserole de soupe aux oignons et j'ai essayé d'inviter quelqu'un qui soit encore éveillé pour pas tout manger.Myriam voulait pas manger, Emile lisait son manga à la lueur de sa lampe de chevet, il a bougé son boule jusque dans la cuisine et a continué à lire pendant que je sortais deux grands bols identiques et une louche en plastique blanc.
C'était la première fois qu'on goûtait ce sachet Maggie, avant c'était toujours Poule aux vermicelles. Emile a dit que la soupe était dorée et ça la rendait à mes yeux encore plus délicieuse, la lumière au dessus de nous était aussi un peu dorée, tout baignait dans une lueur un peu mordorée, c'était chouette.

vendredi



La dernière heure de cours du mardi est toujours un moment d'intense suspense car elle est consacrée au TPE et seule une partie de la classe que la prof désigne reste en classe, l'autre est libérée. Je pense n'avoir jamais été aussi proche du sentiment de ma liberté que pendant ces heures de cours où l'on nous annonçait à la dernière minute que le prof était absent. C'est la seule occasion où je m'autorise un excès d'enthousiasme parce qu'ici et nulle part ailleurs il me semble justifié même s'il cache derrière lui l'angoisse d'un quartier libre dont on ignore l'usage qu'on en fera.
Ce mardi-là ce n'était pas à mon groupe de rester et g
risée par ce retour prématuré chez moi, le désir de consacrer mes heures gagnées à des activités utiles n'a jamais été aussi fort. Dès le matin j'avais eu envie de ranger ma chambre et dans ma tête le processus avait déjà eu lieu : je m'imagine empiler mes livres, nettoyer leur couverture vernis avec un chiffon légèrement imbibé d'Ajax, faire pareil pour mon bureau, classer des cours de français qui trainent dans le cahier d'anglais, recopier les post-it noircis d'idées dans mon carnet, jetter des choses, remettre des stylos dans le pot, j'aime ce besoin d'ordre en milieu de semaine.je retrouve mon lit, ma chambre chaude, mes livres, mes cds et tout mes choix matériels à une heure de la journée où je ne suis pas censée les retrouver, où l'éclairage de ma chambre me les dévoile sous un autre aspect, chaque objet porte encore des traces du matin et je me remémore les actes qui ont fait en sorte qu'ils sont à l'endroit où ils se trouvent maintenant. je sors l'aspirateur, je m'imagine lire allongée sur mon lit, jettant un oeil par dessus le bouquin pour examiner l'impression générale de ma chambre. Chaque meuble et surface ayant été nettoyé indépendemment des autres, de façon isolée -d'abord le bureau, puis la moquette, la table de chevet, le lit, l'armoire- se recolle de part et d'autre avec ses voisins, comme une suite de notes formant l'harmonie d'une mélodie, d'une chambre impeccable et lumineuse.une fois la chambre en ordre ma journée se trouve toujours devant moi, dans une heure elle le sera encore. L'idée de regarder un film, d'avancer de 30 pages dans mon livre, d'écouter des disques, de m'atteler à mes occupations préférées, simples, solitaires me fait vraiment plaisir. Avec Emile nous avons pris l'habitude de manger ensemble l'un en face de l'autre, et nos discussions se substituent à la radio que j'allume en temps normal quand je suis seule, car j'aime et je tiens à manger seule. Nous discutons de Marcel Pagnol et de Marcel Proust, de nos journées respectives, de ce que nous en avons tirés, il me fait remarquer que "les gens sont trop méchants" et moi que "le lycée c'est trop coul, tu peux sécher quand tu veux", puis l'un de nous deux part après son dessert, sans état d'âme pour celui qui reste. Mais nous restons satisfait de cet effort commun et journalier que nous réalisons en prenant la décision et le temps de nous parler, de partager des choses et des moments "en famille". Cette notion en voie de disparition,chaque jour nous sommes zelés à l'idée lui rendre hommage, de la mettre en pratique, cela se ressent dans l'enthousiasme de nos bavardages, dans ce flot incessant de phrases inabouties qui trahissent notre impression de bien faire. Tout porte à croire que les bonheurs sont faciles d'accès, doux et quotidiens.

mardi

notes

08H30
ce matin je me réveille après 12 heures blindées de sommeil, avec juste un entracte vers 00h30, le son de la télé surpassant celui de mon sommeil, je me suis réveillée en même temps que le débat chez Taddéi qui avait pour sujet la New Wave, (débat annulé une semaine avant à cause d'un autre débat jugé trop passionnant (c'était le cas) pour être interrompu) pour me rendormir 40 minutes plus loin.
mon corps était courbaturé de partout à cause de l'endurance de la veille, un début de gorge enrouée, le vertige qui suit une nuit dont on a trop sérieusement profité, réveillée au beau milieu d'un processus de récupérage, je ne demande qu'une chose : me trainer jusqu'à la cuisine, gober les kilocalories et le café mal fait, écouter la radio, prendre une douche, me refaire un corps.
10h30
dans le bus, dans le métro je retrouve avec difficulté le plaisir de regarder les gens autour de moi, leur présence me gêne, se révèle parfois inssuportable. je me sens passée de l'autre côté, du côté des adolescents qui dévisagent les passagers d'une rame tout en écoutant égoïstement leur musique et qui comparent le riff surpuissant et orgasmique d'une guitare avec le visage laid et fatigué de la foule médiocre. C'est ce qui est en train de m'arriver sauf que je lis mon livre et qu'au détour d'un arrêt, quand je prend la peine de lever les yeux de mon rectangle blanc pour regarder les gens qui descendent et qui montent, le contraste entre la flamboyante écriture de Proust (Sur la Lecture) et la décourageante attitude des gens me déprime un peu.

mercredi

IRL



c'est en lisant un passage d'Henry Miller et en révisant mon contrôle d'histoire que je me suis rendue compte que la réalité (passée comme présente, celle future n'étant pas encore réelle) ne m'intéréssait pas du tout et qu'il fallait que je fasse avec, en toute connaissance de cause, que je ne me force pas à m'y intérésser puisque dorénavant ma personnalité se pare d'une nouvelle caractéristique. A présent, je le sais et les autres le sauront, la réalité ne m'intéresse pas.
Dans la vie, la réalité -ou plutôt l'actualité- prend la forme de journaux télévisés, de presse gratuite, d'émissions radio, de débats improvisés, d'opinions recueillies au détour d'une heure de trou, de cours d'histoire et à chaque fois, à l'intérieur de mon corps l'indifférence règne, à l'extérieur c'est le silence, préférant et choisissant le silence au lieu du baratin, je ne parle que de ce que je connais, je peux parler d'un livre ou d'un CD acheté dernièrement, de ces choses atemporelles qui possèdent leur propre réalité ou plutôt qui n'en possèdent pas et qui font qu'elles m'attirent et me plaisent tant.

Je n'allume plus la télé que pour regarder des films, mais les informations actuelles arrivent toujours à passer à travers les portes que je place entre elles et moi et malgré mes quelques efforts je me retrouve à connaître plus ou moins en détails l'affaire de l'Arche de Zoé ou plus récemment, celle de la Société Générale, qui par leur ridicule et (j'ai failli dire banalité) leur hyperréalité me dépriment au plus haut point.
Aucune littérature, aucun art, aucune poésie, aucun talent ne se cache derrière ces contes, ces fables modernes qui n'ont rien avoir avec ma vie, ne m'inspirent rien, ne provoquent rien en moi sinon un léger égarement, un regard fixant le vide quelques secondes et qui finit par reprendre conscience du bol de flocons d'avoine au chocolat noir placé devant lui.

Voici la vie dehors, voici la mienne, placées l'une à côté de l'autre elles se font contrastes, ne se répondent pas, n'ont rien à se dire et le malaise règne.

mardi

A des passants

Ces temps-ci je suis souvent au Starbucks avec charlette, cécilia et marie, toujours assises au même endroit à l'intérieur du dôme mais à l'extérieur du Starbucks. Je suis placée de sorte à pouvoir voir les gens qui marchent : les femmes revenant des soldes les bras moins chargés que ceux de Julia Roberts dans Pretty Woman -et tout ces films qui véhiculent de mauvaises et fausses idées sur le shopping- et les hommes marchant avec détermination vers la dizaine de restaurant qui se présente à eux avec la ferme intention de manger, de combler le vide persistant dans leurs ventres depuis 2 heures.
Parfois j'en croise un plus proche de mon idéal d'homme que les autres et je commence à l'aimer en secret. La proximité de nos corps m'émeut, rien n'aurait pu nous réunir si ce n'est le hasard et aujourd'hui il est bien là, au rendez-vous que je lui ai tacitement fixé en venant m'installer précisement là, en lui offrant mon temps, mes heures d'oisiveté et mon attention qui n'attend plus que lui pour s'y accrocher à la manière d'un hameçon.

j'imagine que dans ce grand mélange de vies personne n'a le droit de se parler, ici l'ignorance est une forme de considération, apprendre à ignorer son prochain, ne pas le frôler, ne pas le regarder avec trop d'insistance et ne rien lui faire croire. tout le monde est de passage et pendant ce temps je tombe 10 fois amoureuse d'hommes mystérieux qui dès l'instant où ils franchissent la limite de mon champ de vision n'existent plus et seul subsiste le souvenir semblable à celui qu'on garde d'un mort.
Ce qui me bouleverse encore plus que les brèves apparitions de ces jeunes hommes ce sont les faux espoirs qu'elles me font miroiter, la nouvelle de leur existence ne m'avance finalement en rien et dans aucun domaine sinon dans celui de la souffrance.
Je finis par recentrer mon attention sur Charlette que j'écoutais sans regarder et qui dans ce contexte symbolise et me ramène à la réalité qui n'est pas forcément si atroce (même si le sentiment de frustration générale qu'elle m'inspire est à l'origine de mon envie d'écrire, de tenir ce blog) mais qui a souvent du mal à se garnir de poésie.
Dehors le temps me fait penser à n'importe quelle chanson d'Interpol, la pluie salope mon manteau, j'enfile mon bonnet, nous retournons en cours. Je suis une passante pour un homme attablé à un café.

mercredi

des comptes à rebours I

il s'agira de parler de mon nouvel an dans le désordre, de la façon qui me conviendra.
Ici le trajet du retour et le lendemain de fête.


Je suis à côté de Rodolphe, beaucoup trop fatiguée pour discuter, je préfère me taire plutôt que de dire de la merde. j'étale mes pieds sur le cuir bleu du siège d'en face. mon jean noir est un peu sale, les boucles des lacets de mes Vans sont grandes, presques comiques.J'hésite à dormir sur son épaule et puis je me dis qu'il ne faut pas être si prévisible. Il me fait la bise et descend à République, j'essaye vraiment de ne pas m'endormir, je suis tellement fatiguée que j'ai presque envie de pleurer. Je monte et descend des escaliers, me demande pourquoi il faut en descendre pour en monter deux mètres plus loin et ça me révolte. Il n'y a personne pour m'aider, je marche tel un zombie lucide.
Mon sac à dos est vide, il n'y a plus les bouteilles de vin ni les livres pour Camille.
Dans le métro je fixe le visage d'une fille qui se trouve loin en face de moi, assez loin pour ne pas qu'elle sente quelqu'un la regarder, elle est sereine, la tête contre la vitre, et ses cheveux ont des boucles, elle revient elle aussi d'une fête, contrairement aux familles tout autour de nous. Les fêtards d'un soir cottoient les lève-tôt.
J'attend le train pendant 10 minutes, je pense à ce que je ferais une fois chez moi, je cherche des raccourcis pour me mettre au lit le plus vite possible, je cherche ce qui me parait essentiel à faire, ce que je devrais ranger pour ne pas que ma mère grogne en me voyant dormir.

Il est 11h du matin.
Le trajet était interminable et une fois devant ma résidence j'ai du mal à réaliser que je suis enfin chez moi, que je vais dormir, que rien de grave ne m'est arrivé, que je m'en sors indemne. Ma mère dort, la radio s'est enclenchée, elle a dû mettre le réveil. Myriam dort dans le lit d'Emile, ça me laisse la chambre pour moi toute seule, je me déshabille entièrement, enfile un bas de pyjama, un t-shirt et un sweat à capuche. Je me sens en forme pour faire des choses.
Je vais sur internet, mange un velouté Fruix à l'abricot, range mes affaires, me lave le visage et les mains et je ne m'endors pas subitement, je pense à des choses, finit par me mettre sur le ventre pour m'endormir progressivement.

A 18h presque pile je me réveille, il fait nuit et ma mère me crie un peu dessus. Emile et mon père sont revenus du Liban, j'essaye de distinguer leurs voix et puis je me lève. Mon père et sur son ordinateur, il se lève pour me prendre dans ses bras, je reste ferme et droite comme toujours, on parle un peu et j'ai faim. Ma mère n'a toujours pas fait les courses, je suis complètement désespérée. Je mange des biscottes et des trucs sans goût qui ne me font pas plaisir. Je ne crois pas avoir allumé la radio, j'ai plutôt pensé à des trucs, à ma journée d'hier. C'était une journée gigantesque, remplie d'action qui, quand j'y repense, m'otent toute volonté d'écrire tellement il y a de choses à répertorier. Je dois penser à une solution, à une forme libre d'écriture qui me permettrait de m'épancher de façon à ce que cela devienne agréable. je ne dois pas voir ça comme un devoir mais je refuse de ne rien écrire sur cette journée.

Nous sommes le 2 janvier, à présent je remarque que le 31 se fond dans le 1er janvier qui se fond lui-même dans le 2 janvier. Ces 3 journées ne forment qu'un même bloc, envelopper dans cette même ambiance bizarre, à cheval entre deux mondes aux frontières ténues. Je dois digérer ce flot de vie, cette fête, ces rencontres, faire le point sur mon comportement avec les autres, voir ce qui n'allait pas, j'en ai pour un paquet de temps et je ne peux vraiment pas me résoudre à contourner cette étape. Personne n'en a envie mais une fois de plus nous acceptons la cadence du temps. personnellement je m'habituerai à écrire 2008 sur les copies doubles des contrôle avec quelques difficultés au départ. je met toute ma bonne volonté à essayer de faire une place à 2008, comme à un voisin de chambre un peu trop encombrant. je tente aussi de réduire l'importance et la signification de ce passage à une nouvelle année car désormais, je peux le dire, j'ai décidé que la nostalgie me fatiguait.